Academia.eduAcademia.edu
RAPPORT DE FOUILLE PRÉVENTIVE STRASBOURG, Bas-Rhin Rue de Lucerne - Rue du Jeu-de-Paume VOLUME II : ÉTUDES Le système défensif primitif et le processus d’urbanisation d’un secteur du faubourg de la Krutenau du Moyen Âge à nos jours sous la direction de Maxime WERLÉ avec la collaboration de Emmanuelle BONNAIRE Aurélia BORVON Yves GRUET Audrey HABASQUE Mathias HIGELIN Agnieszka KOZIOL Matthieu LE BAILLY Céline MAICHER Cristiano NICOSIA Olivier PUTELAT Nathalie SCHNEIDER Cécile SIMON Jean-Michel WENDLING N° d’opération : 5966 2015 RAPPORT DE FOUILLE PRÉVENTIVE STRASBOURG, Bas-Rhin Rue de Lucerne - Rue du Jeu-de-Paume VOLUME II : ÉTUDES Le système défensif primitif et le processus d’urbanisation d’un secteur du faubourg de la Krutenau du Moyen Âge à nos jours sous la direction de Maxime WERLÉ avec la collaboration de Emmanuelle BONNAIRE Aurélia BORVON Yves GRUET Audrey HABASQUE Mathias HIGELIN Agnieszka KOZIOL Matthieu LE BAILLY Céline MAICHER Cristiano NICOSIA Olivier PUTELAT Nathalie SCHNEIDER Cécile SIMON Jean-Michel WENDLING 22 novembre 2012 - 31 janvier 2013 N° de prescription : 2012/199 N° de désignation : 2012/319 Code INSEE : 67482 N° d’opération : Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Tél. 03 90 58 55 34 Fax 03 90 58 55 35 www.pair-archeologie.fr 2 allée Thomas Edison ZA Sud - CIRSUD 67600 SÉLESTAT 5966 Vol. I Strasbourg, rue de Lucerne - rue du Jeu de Paume NOTICE SCIENTIFIQUE La fouille archéologique, motivée par le projet de construction d’un immeuble destiné à accueillir une résidence pour jeunes actifs, devait permettre de préciser les modalités du développement topo-chronologique de l’occupation et de l’urbanisation de ce secteur du faubourg de la Krutenau du Moyen Âge à nos jours. Elle a permis de d’identiier et d’étudier plusieurs phases d’une occupation continue de la in du 14e s. jusqu’à nos jours. La mise en place du substrat géologique apparaît relativement tardive, le site étant manifestement soumis à l’inluence des luctuations du réseau hydrographique à la in du 14e s. C’est à ce moment, dans les années 1386-1388, qu’est aménagé le système défensif primitif du faubourg de la Krutenau, constitué d’un fossé à fond plat et à escarpe talutée et d’une levée de terre. Les sources écrites rapportent que cette fortiication est restée inachevée, puisqu’elle devait initialement être renforcée par un mur d’enceinte maçonné, au lieu de quoi elle a simplement été complétée par une palissade (?), dont aucune trace archéologique n’a été décelée. En arrière de la levée de terre, la partie occidentale du terrain est occupée par un vaste creusement, peu profond, dont la fonction nous échappe (fosse d’extraction de limon ?). Le système défensif mis en place dans les années 1386-1388 est abandonné et démantelé dès la première moitié du 15e s. À cette époque, le faubourg a été entouré par un nouveau système défensif, plus vaste que celui de la in du 14e s. et implanté en-dehors de l’emprise fouillée. Le fossé primitif a dès lors été comblé et la levée de terre arasée. Cette campagne de terrassements et de nivellement a précédé un exhaussement massif du terrain, destiné à l’assainir et à le viabiliser. Ces changements sont vraisemblablement intervenus dans la première moitié ou vers le milieu du 15e s. Les vestiges mobiliers recueillis dans les couches de cette phase témoignent des activités artisanales exercées à proximité du site, en particulier la production de terres cuites architecturales et la fabrication de perles en os. Un premier bâtiment, d’allure modeste (habitat ?), est construit sur le site dans la deuxième moitié du 15e ou au début du 16e s. Il était établi à l’extrémité de l’actuelle rue du Jeu-de-Paume, en bordure ou à proximité immédiate de la voie, dans un secteur marginal du faubourg, encore faiblement urbanisé et occupé par de nombreux jardins. Le terrain était bordé par le nouveau système défensif (hors emprise de fouille) mis en place dans la première moitié du 15e s. Peu après, à la in du 15e ou dans la première moitié du 16e s., un nouveau bâtiment, à vocation agro-pastorale, est construit en arrière du précédant. Il s’agit d’un immeuble de plan quasiment rectangulaire (12,40 x 9,50 m hors-œuvre). Les charges et les poussées des planchers et de la toiture étaient remportées sur les murs périphériques en briques et sur un support isolé, implanté en position centrale. Le rez-de-chaussée formait un seul espace indivis de près de 100 m² et abritait une cuve maçonnée. Le bâtiment comportait en outre un étage, vraisemblablement édiié en pan-de-bois, et était couvert d’un toit à deux versants. Les sources écrites permettent d’identiier l’immeuble à une « grange » appartenant à un boucher : le rez-de-chaussée était occupé par une étable à bœufs et l’étage par un fenil. Il devait servir à la stabulation et à l’engraissement d’animaux de boucherie. La fosse maçonnée correspond probablement à une fosse à purin ou à lisier. Les vastes espaces non bâtis situés dans l’environnement immédiat de l’étable pourraient, par ailleurs, avoir servi de prairies de pâturage. Dans l’espace compris entre le bâtiment d’habitation sur la rue et la « grange » ont par ailleurs été aménagées des latrines, dont subsiste la fosse maçonnée en briques, et une fosse à déchets. Le mobilier recueilli dans leur comblement est notamment constitué de nombreux restes de faune, de mobilier en céramique et en verre ; il témoigne de la vie matérielle des occupants de la parcelle dans le courant du 16e s. Le bâtiment d’habitation sur rue est démoli et reconstruit au 17e ou au début du 18e s., tandis qu’une nouvelle limite parcellaire est établie vers le milieu du 18e s., la parcelle étant par ailleurs dotée d’un puits. En arrière du bâtiment sur rue, l’ancienne grange est victime d’un incendie en 1760 et remplacée en 1788 par un nouvel immeuble d’habitation. Dans la parcelle mitoyenne, où subsistaient de vastes espaces de jardin, les seuls vestiges attribués à cette phase sont deux structures en creux, parmi lesquelles igure une fosse dépotoir. La densiication du bâti se développe dans cette partie du site, jusqu’alors demeurée vide de construction, dans le premier tiers du 19e s. Elle s’intensiie encore dans la deuxième moitié du 19e s. et dans la première moitié du 20e s., lorsque deux immeubles de rapport sont édiiés en marge du terrain fouillé, de même qu’un puits et d’autres structures liés à la gestion des eaux usées et pluviales. Toutes ces constructions, vétustes ou non conformes aux projets d’urbanisme de la Ville, sont démolies dans la deuxième moitié du 20e et au début du 21e s. 10 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan 7. ÉTUDE DU MOBILIER MÉTALLIQUE Mathias HIGELIN Strasbourg, rue de Lucerne Vol. II : Études 7. Étude du mobilier métallique 7.1. CONDITIONS ET MÉTHODOLOGIE Le corpus présenté dans cette étude regroupe au moins 67 individus (NR : 183 ; poids : 44,3 kg), enregistrés dans 27 unités stratigraphiques. Entre la in du 14e s. et nos jours, il est associé à 9 phases chronologiques et composé de scories (18 lots ; poids 39,5 kg), d’objets en fer (NMI : 15 ; poids : 4,7 kg), en alliage cuivreux (NMI : 15 ; poids : 75,7 g) et en pierre (8,5 g). La plus grande quantité de matériel est associée à la phase E3 (in 15e – 16e s.), dont la majorité a été découverte dans les comblements des latrines LA1067. Plusieurs domaines sont représentés : la production (scories, lime, aiguille à chas en fer), la vie domestique (récipient en fer, clé de robinet en alliage cuivreux), l’immobilier (clé, patte en fer), les effets personnels (ferret de lacet) et les inclassables. La phase C1 (première moitié du 15e s.) a révélé une quantité moyenne de matériel par rapport aux autres phases. La plus grande partie provient des couches de comblement du fossé FO1091, notamment deux lots de scories comportant des culots de forge, une petite charnière et un renfort de couverture de livre en alliage cuivreux. Les autres phases n’ont révélé qu’une petite quantité de matériel, entre 1 et 8 individus. Les clous en fer ont simplement été renseignés dans l’inventaire du mobilier et ne sont pas comptabilisés dans l’étude (cf. Vol. 3, annexe 4). Il s’agit de 71 individus (poids : 0,9 kg), répartis dans 19 unités stratigraphiques et associés à cinq phases chronologiques (C1, C2, E3, F, G). La dénomination des différents types de tête est inspirée par le travail d’É. Fuhrer sur le corpus provenant d’un quartier de Montbéliard1. Plusieurs types de clous ont été identiiés : à tête homme, à tête plate carré, à tête plate rectangulaire, à tête plate ronde et à tête triangulaire. 7.1.1. Pendant la fouille : détection, prélèvement et enregistrement La détection du mobilier métallique a été réalisée uniquement à l’œil nu, sans l’aide d’un détecteur de métaux. La majorité du mobilier a été enregistrée sous le numéro d’unité stratigraphique ou de Fait dans lequel il a été trouvé (seul quatre objets ont été trouvés hors stratigraphie). 7.1.2. En post-fouille : inventaire, restauration et étude Un inventaire sommaire a été réalisé à l’issue de la phase de terrain. Il a permis de déterminer les types d’intervention nécessaires à la lecture des objets (simple nettoyage, micro-sablage, radiographie X). Cet inventaire a été dressé d’après le système établi par le PAIR : un enregistrement informatique à l’aide d’un tableur (Excel) comportant des champs à renseigner. Un numéro d’inventaire est attribué à chaque objet ou lot d’objets. Il se compose comme suit : XXXX–XXX–0000–0 • XXXX : numéro d’opération délivré par le Service régional de l’archéologie • XXX : « code mobilier », en fonction du matériau2 • 0000 : unité stratigraphique dans laquelle l’objet a été prélevé • 0 : numéro d’inventaire attribué de façon incrémentale Cantrelle et al. 2000 : 71-73. CEM : émaux sur métaux ; CXX : matériau composite indéterminé ou matériau divers ; GBS : bois et vannerie ; MAG : argent ; MCU : cuivre et alliage cuivreux ; MFE : fer et alliage ferreux ; MPB : plomb et alliage plombifères ; MXX : métal et alliage indéterminés ou métaux composites ; OTR : matière dure animale ou humaine travaillée ; RLT : lithique ; TCU : terre cuite utilitaire, décorative ou votive ; VXX : verre. 1 2 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan 251 7. Étude du mobilier métallique Vol. II : Études Strasbourg, rue de Lucerne Une fois l’inventaire réalisé, le mobilier métallique a fait l’objet de traitements par le laboratoire de restauration du PAIR. Le mobilier en fer a été dégagé partiellement de sa gangue par micro-sablage et micro-meulage. Les collages et consolidations nécessaires ont été réalisés à l’aide d’une colle cyanoacrylate et d’une résine époxydique. La stabilisation d’une sélection de ces objets ferreux sera réalisée par un prestataire. La majorité du mobilier en alliage cuivreux a nécessité un nettoyage mécanique, et parfois chimique. Il a également fait l’objet d’une stabilisation par immersion (dans une solution de benzotriazole) et d’une protection au vernis (Paraloid B72). Le catalogue descriptif constitue la base documentaire de l’étude. Il est composé de notices (intégrées à l’inventaire réglementaire en annexe), illustrées de dessins et de photographies. Les notices comportent les critères suivants : • numéro d’inventaire • identiication • matériau(x) • état de conservation de la forme • description • nombre de reste(s) • dimensions (en millimètre) et poids (en gramme) • contexte de découverte (type, phase et datation) La longueur des clous renseignée dans l’inventaire est mesurée entre la pointe et sous la tête (sauf pour les clous à tête triangulaire en crochet comprise dans la mesure) et la largeur est mesurée sous la tête. La plupart des clous ont des tiges de section rectangulaire. Le mobilier a ensuite été classé dans des domaines et catégories prédéinis pour réaliser son analyse fonctionnelle. Ce système de classement, développé notamment par les laboratoires de Lattes et de Bibracte, a récemment fait l’objet d’une publication, encourageant sa diffusion pour faciliter les comparaisons entre corpus3. Il hiérarchise deux niveaux, regroupant vingt-cinq catégories réparties en dix domaines. L’identiication d’un objet permet généralement de connaître sa fonction primaire, et ainsi de le classer dans une catégorie fonctionnelle. Le contexte de découverte permet ensuite l’interprétation de son usage, rattaché à l’un des domaines suivants4 : • production • • • • • • • • • domestique immobilier personnel transport échanges vie sociale militaire spirituel inclassable agro-pastoral, chasse et pêche, artisanat, divers production activité culinaire, éclairage et chauffage, ameublement gros œuvre, huisserie, hydraulique parure et vêtement, soin du corps attelage et véhicule, équipement lié à l’animal, navigation compte, mesure et échange, écriture divertissement, musique équipement militaire statuaire, croyance et funéraire élément d’assemblage et de serrurerie, divers et polyvalent, indéterminé Briand et al. 2013 : 14-19. Ibidem. La déinition des domaines et catégories fonctionnels, présentée dans la publication, n’est pas rappelée ici. 3 4 252 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Strasbourg, rue de Lucerne Vol. II : Études 7. Étude du mobilier métallique 7.2. PHASE A (JUSQU’À LA FIN DU 14e S.) Classée dans le domaine du transport, seule une ferrure animale est associée à cette phase (5966-MFE-1279-1). Elle est archéologiquement complète et trois des quatre clous de ixation sont partiellement conservés (ig. 52). Il s’agit d’un fer dit « à cheval » présentant des branches peu larges, une rive externe légèrement ondulée et des éponges rectangulaires. Masquées par les clous, les étampures et les contre-perçures ne sont pas lisibles. Sa taille est moyenne, 82 mm de long sur 85 mm de large. La morphologie des fers à cheval varie en fonction de la forme du sabot des équidés, de leurs éventuelles pathologies et de leur emploi, mais certains critères comme la couverture (largeur des branches), la forme des étampures et des éponges peuvent varier dans le temps. Ces critères typo-chronologiques ont notamment été mis en évidence par J. Clark pour le corpus londonien5, avec des variantes constatées également sur plusieurs sites français6. L’individu découvert rue de Lucerne est cependant dificile à rapprocher de cette typologie par manque de lecture d’un des principaux critères : la taille des étampures. Sa taille pourrait correspondre à un fer de mulet (ou de bardot), dont la longueur moyenne est de 102 mm sur 87 mm de large7. 5966-MFE-1279-1 0 5cm Échelle 1:2 Fig. 52. Mobilier métallique associé à la phase A. DAO M. Higelin 7.3. PHASE B (FIN DU 14e – PREMIÈRE MOITIÉ DU 15e S.) Le mobilier métallique associé à cette phase est peu abondant (NR : 6 ; NMI 4 ; 291 g). Trois individus ont été trouvés dans les couches de la levé de terre TA1275 et un individu dans une couche d’alluvions ines anthropisées (US 1189). Deux scories légères, bulleuses et peu denses ont été classées dans le domaine de la production (5966-CIN-1089-1 et 5966-CIN-1189-1). Elles ont une masse peu importante (220 g et 36 g.) Deux individus sont restés inclassables (ig. 53). Un couteau en fer (5966-MFE1088-1) comportant une lame à dos droit et tranchant convexe correspond à la catégorie des couteaux polyvalents et couteaux de table (ig. 54). Son tranchant atteint une longueur de 85 mm. Aucune perforation ou reste de rivet n’est visible sur la partie de soie conservée, de sorte qu’il est dificile de préciser si un manche rapporté est absent. Un objet en fer resté indéterminé (5966MFE-1088-2) présente une forme allongée et comporte de part et d’autre le départ d’une tige de section carrée. 5 Clark 1995. 6 Portet, Raynaud 2009 : 222-233. 7 Portet, Raynaud 2009 : 222-233. Les fers d’âne varient entre 82 mm et 102 mm de long et 60 mm à 75 mm de large, et les fers à cheval varient entre 89 mm et 119 mm de long sur 70 à 113 mm de large. Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan 253 7. Étude du mobilier métallique Vol. II : Études Strasbourg, rue de Lucerne 5966-MFE-1088-1 5966-MFE-1088-2 0 5cm Échelle 1:2 Fig. 53. Mobilier métallique associé à la phase B. DAO M. Higelin Fig. 54. Couteau en fer 5966-MFE-1088-1. Photo F. Schneikert 7.4. PHASE C1 (PREMIÈRE MOITIÉ DU 15e S.) Cette phase a révélé une quantité moyenne de mobilier métallique par rapport aux autres phases (NR : 101 ; NMI : 12 ; poids : 9156 g). Il est associé à deux contextes : le comblement du fossé FO1091 (US 1082, 1084 et 1087) et la dépression indéterminée CR1233 (US 1194, 1252 et 1253). Le domaine de la production rassemble des lots de scories et un probable outil en fer. Deux lots de scories ont été découverts dans les comblements du fossé FO1091, représentant une masse totale de 4,76 kg pour un nombre de 38 restes (5966-CIN-1084-1, 5966-CIN-1087-1 et 5966-CIN-1087-2). Un autre lot de scories a été trouvé dans le comblement de la dépression CR 1233 (US 1194). Il s’agit de 52 restes d’une masse totale de 4,18 kg (5966-CIN-1194-1). Le probable outil en fer (5966-MFE-1194-1) provient également de ce comblement (ig. 55). Parmi ces lots de scories, on peut noter la présence de culots de forge, de forme plano-convexe et comportant des plages oxydées et des empreintes de charbon et de résidu de métal, dont un exemplaire a été coupé en quart. Ces restes témoignent d’une activité de forge, mais sans pouvoir cependant identiier le lieu de cette activité. Il faut également remarquer la présence de deux fragments de briques déformées et surcuites (5966-CIN-1087-2). Seul un objet a été classé dans le domaine de la vie domestique. Une charnière en alliage cuivreux (5966-MCU-1082-1), provenant du comblement du fossé FO1091, comporte deux ailes formées par une tôle repliée, traversées par un rivet également en alliage cuivreux. Chacune des ailes est percée pour sa ixation. L’objet a probablement été employé sur un petit meuble (coffret ?). Deux éléments d’huisserie et de serrurerie provenant de la dépression indéterminée CR1233 (US 1252) ont été classés dans le domaine de l’immobilier. Une clé en fer à fonctionnement par rotation (5966-MFE-1252-1) comporte un panneton rapporté sur la tige pleine de section circulaire, terminée par un 254 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Strasbourg, rue de Lucerne Vol. II : Études 7. Étude du mobilier métallique anneau semi-circulaire (ig. 56). La forme de cet anneau n’apparaît que dans la seconde moitié du 14e s. et le panneton rapporté n’appartient à aucun type connu de clé pour cette période8. Un mentonnet en fer (5966-MFE-1252-2) présente une soie de section rectangulaire, dont l’extrémité se termine par un décrochement triangulaire. Ce type d’objet est employé pour maintenir la clenche d’une porte. Un possible renfort de couverture de livre (5966-MCU-1087-1) a été classé dans le domaine des échanges. Il provient du comblement du fossé FO1091. Deux exemplaires semblables ont notamment été identiiés à l’Ortenbourg, dans des contextes datés du 15e ou du 16e s.9 Quatre fragments d’objets en fer ont été classés parmi les éléments inclassables, notamment un fragment de lame de couteau (5966-MFE-1253-2) provenant du comblement de la dépression CR1233. Fig. 55. Mobilier métallique associé à la phase C1. DAO M. Higelin 5966-MCU-1082-1 5966-MCU-1087-1 Fig. 56. Clé en fer 5966-MFE-1252-1. Photo F. Schneikert 5966-MFE-1252-1 5966-MFE-1194-1 5966-MFE-1252-2 5966-MFE-1253-2 0 5cm Échelle 1:2 8 9 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Linlaud 2014 : 156-157. Rieb, Salch 1973 : 49, pl. XLII, n° 267a et 267b. 255 7. Étude du mobilier métallique Vol. II : Études Strasbourg, rue de Lucerne 7.5. PHASE C2 (MILIEU 15e – DÉBUT 16e S.) Cette phase a révélée une faible quantité de mobilier métallique par rapport aux autres phases (NR : 10 ; NMI : 5 ; poids : 266 g). Deux lots de scories provenant des couches d’occupations 1024 et 1271 ont été classés dans le domaine de la production (5966-CIN-1024-1 et 5966-CIN1271-1). Ces lots de scories représentent une faible quantité (7 restes) et une masse peu importante (206 g). Trois fragments d’objets en fer sont restés indéterminés. Ils ont été classés parmi les éléments inclassables (5966-MFE-1024-1, 5966-MFE-1181-1 et 5966MFE-1316-1). 7.6. PHASE E3 (FIN 15e – 16e S.) Cette phase est celle qui a révélé la plus grande quantité de mobilier métallique (NR : 44 ; NMI : 23 ; poids : 798,2 g) (ig. 57). La majorité provient des couches de comblement des latrines LA1067. Seuls trois objets sont associés à la fosse FS1385 et un objet a été découvert couche d’occupation (US 1292). Le domaine de la production rassemble deux objets et deux lots de scories. Un fragment de lime mi-ronde (5966-MFE-1059-9), trouvé dans le comblement des latrines LA1067, comporte de ines rainures radiales, conservées en partie sur la surface convexe. Cet outil permet de détacher par frottement des parcelles de matière, probablement du métal (inesse des dents). Bien qu’attestant sans doute de travaux réalisés dans le cadre domestique, une aiguille à chas en fer (5966-MFE-1059-14) a été classée dans ce domaine (ig. 58). De petite dimension (long. : 51 mm ; diam. : 1,4 mm), elle a également été découverte dans le comblement des latrines LA1067. On peut citer une comparaison régionale, d’une taille toutefois plus importante (long. : 98 mm ; diam. : 2,5 mm), découverte dans un contexte daté du 15e ou du 16e s. à l’Ortenbourg10. La quantité de scories est peu importante (NR : 5 ; poids : 138 g), les deux lots provenant du comblement des latrines LA1067 (5966-CIN-1059-1) et de celui de la fosse FS1385 (5966-CIN-1352-1). Quatre individus découverts dans les comblements des latrines LA1067 ont été classés dans le domaine de la vie domestique. Il s’agit de trois récipients en fer, dont un, probablement une casserole, est relativement bien conservé (5966-MFE-1059-7). De forme circulaire, le bord et les parois sont droits et le fond convexe (ig. 58). Un petit cerclage externe est aménagé sous le bord. Le manche, ixé par huit rivets en alliage cuivreux, n’est pas conservé (ig. 59). Les deux autres récipients sont très lacunaires, seuls des fragments de bord étant conservés (5966-MFE-1059-15 et 5966-MFE-1059-16). Une clé de robinet en alliage cuivreux (5966-MCU-1059-1) comporte une tête trilobée surmontant une base légèrement conique et percée (ig. 60). Ce type de robinet, dit « robinet à noix », est bien connu pour cette période et fréquemment associé aux fontaines à eau, aux vinaigriers ou aux tonneaux11. Sa petite taille (ht. : 57,5 mm ; larg. : 28,5 mm) pourrait indiquer un emploi sur les fontaines murales destinées au lavage des mains (aquamanile)12. De nombreuses variantes de la tête sont connues, la plus courante représentant un coq. Plusieurs exemplaires à tête en forme de coq sont attestés dans la région, dans des contextes datés du 15e et du 16e s. : à Strasbourg, à Birkenfels, à l’Ortenbourg13 et à Châtenois14. 10 11 12 13 14 256 Rieb, Salch 1973 : 42, pl. XXXV, n° 211. Fuhrer et al. 2000 : 111. Meller et al. 2008 : 284-286. Rieb, Salch 1973 : 34, pl. XXVI, n° 179, 180, 181. Koch et al. 2008 : n° 5108-MCU-30003B-13. Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Strasbourg, rue de Lucerne Vol. II : Études 7. Étude du mobilier métallique Classés dans le domaine de l’immobilier, deux individus appartiennent à la catégorie de l’huisserie et de la serrurerie, découverts dans le comblement des latrines LA1067. Une clé en fer à fonctionnement par rotation et à tige forée est conservée dans un état relativement lacunaire (5966-MFE-1059-4). Une patte en fer comportant une soie et une extrémité pliée à l’équerre pourrait correspondre à une butée de porte ou de volet (5966-MFE-1059-10). Le domaine personnel est attesté par un ferret de lacet en alliage cuivreux (5966-MCU-1060-2), découvert dans le comblement des latrines LA1067. Il est constitué d’une ine tôle enroulée en forme de tube, fermé d’un côté, de 18 mm de long pour un diamètre extérieur de 2,2 mm. Ce type de ferret est couramment utilisé, de façon utilitaire ou décorative, sur des vêtements nobles ou modestes entre le 13e et le 18e s. Ces embouts de lacets appartiennent au mouvement vestimentaire consistant à adapter le costume sur le corps15. Treize individus sont restés inclassables. La majorité provient du comblement des latrines LA1067. Seuls un anneau et une chaîne ont été trouvés dans le comblement de la fosse FS1385 et un couteau dans une couche d’occupation (US 1292) (ig. 60, 61 et 62). Parmi les objets indéterminés, il faut remarquer un probable jeton en alliage cuivreux (5966-MXX-1059-1) associé aux comblements des latrines LA1067. De forme circulaire (diam. : 2,8 mm), il comporte deux perforations latérales ainsi que des inscriptions réalisées par frappe sur une face : un symbole indéterminé et probablement le chiffre 46. Trois exemplaires de ce type de jeton ont notamment été découverts récemment, à 500 m environ, lors d’une fouille rue des Veaux16. Leur attribution chronologie était restée imprécise, entre le 18e et le 19e. L’exemplaire découvert rue de Lucerne dans un contexte chronologiquement plus assuré, in du 15e début du 16e s., pourrait indiquer qu’il s’agissait d’objets plus anciens retrouvés de façon résiduelle dans des contextes plus récents. L’hypothèse de leur emploi par des teinturiers pour identiier les textiles avait été avancée, cependant aucune nouvelle donnée ne permet de le conirmer. 15 16 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Berthon et al. 2013 : 79. Werlé et al. 2011, vol. 1, p. 181-182 ; vol. 2, p. 160, ig. 227, n° 1, 2, 3. 257 7. Étude du mobilier métallique Vol. II : Études Strasbourg, rue de Lucerne 5966-MFE-1059-14 5966-MFE-1059-7 5966-MFE-1059-9 5966-MCU-1059-1 5966-MFE-1059-15 5966-MFE-1059-16 5966-MFE-1059-10 5966-MCU-1060-2 5966-MFE-1059-4 5966-MFE-1292-1 5966-MFE-1059-8 5966-MCU-1059-2 5966-MCU-1059-3 5966-MCU-1060-1 5966-MCU-1352-1 5966-MFE-1059-13 5966-MCU-1352-2 5966-MXX-1059-1 0 5cm Échelle 1:2 0 2,5cm 5966-MCU-1069-1 Échelle 1:1 Fig. 57. Mobilier métallique associé à la phase E3. DAO M. Higelin 258 Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Strasbourg, rue de Lucerne Vol. II : Études 7. Étude du mobilier métallique 58. 60. 59. Fig. 58. Aiguille en fer 5966-MFE-1059-14 61. Fig. 59. Casserolle en fer 5966-MFE-1059-7 Fig. 60. Clé de robinet en alliage cuivreux 5966-MCU-1059-1 Fig. 61. Couteau en fer 5966-MFE-1292-1 Fig. 62. Chaîne en alliage cuivreux 5966-MCU-1352-2 Fig. 63. Objet indéterminée 5966-MCU-1069-1 62. Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan 63. 259 7. Étude du mobilier métallique Vol. II : Études Strasbourg, rue de Lucerne 7.7. PHASE F (17e – DÉBUT DU 19e S.) Seuls trois individus sont associés à cette phase (NR : 3 ; NMI : 3 ; poids : 183,3 g). Deux scories légères de petite taille ont été classées dans le domaine de la production (5966-CIN-1289-1 et 5966-CIN-1437-1). Elles ont été découvertes dans une couche d’occupation (US 1289) et dans le comblement de la fosse FS1438. Un fragment de tige en alliage cuivreux (5966-MCU-1322-1) est resté inclassable. Il a été trouvé dans une couche d’occupation (US 1322). 7.8. PHASE G (DÉBUT DU 19e S.) Seule une pierre à briquet (5966-RLT-1044-1) est associée à cette phase. Il s’agit d’une pièce réalisée dans un silex opaque et luisant, de couleur rouge vif au cœur et jaune dans la partie sous-corticale. Le matériau présente les caractéristiques du silex de l’Oxfordien supérieur, localement appelé « jaspe » dont les gîtes primaires sont localisés dans le Markgrälerland (Allemagne, Baden-Württemberg), situé sur la rive droite du Rhin, face à Mulhouse17. Les pierres à briquet sont utilisées avec d’autres matériaux pour produire du feu. 7.9. PHASE H (MILIEU DU 19e – DÉBUT DU 20 e S.) Huit individus sont associés à cette phase (NR : 8 ; NMI : 8 ; poids : 3709 g). Ils ont été découverts dans le comblement du puits PT1337. Un crampon de maçonnerie en fer (5966-MFE-1333-1), notamment conservé avec un scellement en plomb, et un crampon de charpente en fer (5966-MFE-1333-2) ont été classés dans le domaine de l’immobilier. Les six autres individus sont restés indéterminés. 17 260 P. Angeli et K. Gernigon, dans Bonvalot 2009 : 32-33. Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Strasbourg, rue de Lucerne Vol. II : Études 7. Étude du mobilier métallique BIBLIOGRAPHIE Berthon et al. 2013 : BERTHON (Amélie Aude), dir. — Aspects de la culture matérielle médiévale et moderne. La Rochelle, XIIIe – XIXe siècles : les objets archéologiques dans leur contexte. Limoges : Éditions Éveha, 2013. 177 p. : ill. Bonvalot 2009 : BONVALOT (Florian). — Guémar, Rotenberger Weg, Zone d’activités du Muehlbach (tranche 4). Rapport de diagnostic (14-23 septembre 2009). Sélestat : PAIR, 2009. 70 p. : ill. Clark 1995 : CLARK (John). — The Medieval Horse and its Equipment, c. 1150-c.1450. London : HMSO, 1995. 185 p. Fuhrer et al. 2000 : FUHRER (Élisabeth), GOY (Corinne), MUNIER (Claudine). — Aspects de la vie quotidienne. In : CANTRELLE (Sylvie), GOY (Corinne), MUNIER (Claudine), dir. — Histoire d’un quartier de Montbéliard (Doubs). Le bourg Saint-Martin (XIIIe–XXe s.). Paris : Édition de la Maison des Sciences de l’Homme, 2000, p. 57-123 (Document d’archéologie française ; 83). Pôle d’Archéologie Interdépartemental Rhénan Koch et al. 2008 : KOCH (Jacky). — Châtenois (Bas-Rhin). Jardin du Presbytère. Rapport de fouille programmée. Sélestat : PAIR, 2008. 35 p. Portet, Raynaud 2009 : PORTET (N.), RAYNAUD (M.-A.). — Le mobilier en fer : les objets équestres. In : BOURGEOIS (L.), dir. — Une résidence des comtes d’Angoulême autour de l’an Mil. Le castrum d’Andone (Villejoubet, Charente). Publication des fouilles d’André Debord (1971-1995). Caen : Publications du CRAHM, 2009, p. 202-233. Rieb, Salch 1973 : RIEB (J.-P.), SALCH (Ch.-L.). — Aspects de la vie au Moyen Âge et à la Renaissance. Dix ans de fouilles. Strasbourg : Centre d’Archéologie Médiévale de Strasbourg, 1973. 68 p. : ill. Meller et al. 2008 : MELLER (Harald), dir. — Fundsache Luther. Archäologen auf den Spuren des Reformators. Catalogue de l’exposition de Halle du 31 octobre 2008 au 26 avril 2009. Stuttgart : Theiss, 2008. 343 p. : ill. 261